ERTMS/ATO est le système européen interopérable permettant le pilotage automatique des trains, en présence d’un conducteur. Cet autopilote fonctionne en tandem avec le système européen de signalisation ERTMS/ETCS, dont il doit respecter les ordres, tout en s’inscrivant dans la table horaire.
Découvrons les principes du pilotage automatique des trains (GoA2), et d’ERTMS/ATO : son application dans le système harmonisé ERTMS.
Pour une bonne compréhension des notions abordées dans cet article, je vous recommande de lire en premier lieu :
ERTMS : le système européen de gestion de trafic des trains
Résumé de l’article
En niveau d’automatisation GoA1, des aides à la conduite existent permettant la régulation de vitesse, ou encore l’affichage de recommandations de conduite, afin de pratiquer l’éco-conduite. Le tout en étant constamment supervisé par le système de protection du train, l’ATP.
C’est en GoA2, qu’un dispositif permet de piloter automatiquement le train, en prenant en compte un ensemble d’informations en entrée, entre autres les horaires de la mission, ainsi que la signalisation à respecter.
Le pilotage automatique offre des bénéfices clairs. Il permet de réduire la consommation d’énergie par une conduite optimisée et durable. De plus, il permet d’uniformiser la conduite d’une flotte de trains, ce qui réduit la dispersion horaire dans le schéma d’exécution. Cela dégage des capacités supplémentaires, qui peuvent être utilisées pour injecter plus de trains.
Ces bénéfices ont motivé l’introduction du pilotage automatique dans les milieux assez homogènes et fermés : les métros. Des systèmes intégrés et propriétaires nommés CBTC y sont massivement utilisés. Pour autant, le CBTC n’est pas utilisable sur le réseau ferré national, car l’interopérabilité est obligatoire.
C’est ainsi que le pilotage automatique interopérable a été mis au point : c’est ERTMS/ATO. Cet autopilote fonctionne en tandem avec l’ATP ERTMS/ETCS, et fait pleinement partie du système ERTMS. Il est désormais intégré à la Spécification Technique d’Interopérabilité – Contrôle Commande et Signalisation.
Pour tirer le plein potentiel d’ERTMS/ATO, et porter une ligne à son potentiel maximal de capacité, deux éléments fondamentaux du système ferroviaire sont à moderniser. L’ATP d’une part, en passant à un niveau radio d’ERTMS/ETCS. Le TMS d’autre part, en utilisant des systèmes de gestion du trafic hautement automatisés. Ce triptyque ERTMS/ETCS niveau 2, TMS automatisé et ERTMS/ATO, deviendra incontournable ces prochaines années, pour faire du transport de masse sur le réseau ferré national, et ainsi contribuer au report modal vers le train.
Dernière mise à jour : Décembre 2024
ERTMS/ATO : l'autopilote interopérable des trains by Bastian Simoni is licensed under CC BY-NC-SA 4.0
1 Introduction
Ce chapitre se base sur le SUBSET-125 version 1.0.0.
1.1 La création d’ERTMS/ATO
Lors de la conception d’ERTMS/ETCS, il n’était pas prévu d’y accoler un autopilote, permettant de gérer automatiquement la traction et le freinage du train, en présence d’un conducteur (GoA2). C’est à partir de la décennie 2010 que les opérateurs et industriels se mettent autour de la table, afin de concevoir et spécifier l’option d’autopilotage fonctionnant avec ERTMS/ETCS : c’est ATO over ETCS (AoE).
ATO over ETCS a intégré la révision 2023 de la Spécification Technique d’Interopérabilité – Contrôle-Commande et Signalisation, et plus généralement, le système ERTMS. C’est pourquoi ATO over ETCS est officiellement nommé ERTMS/ATO.
ERTMS/ATO devient la solution de référence pour mettre en place du pilotage automatique sur le réseau ferré national, et par extension sur le futur espace ferroviaire unique européen.
1.2 Définitions d’ERTMS/ATO
ERTMS/ATO procure un ensemble de fonctions non sécuritaires relatives à la traction et au freinage automatiques, à l’arrêt du train à une position précise, à l’ouverture et fermeture automatiques des portes, et à d’autres fonctions habituellement de la responsabilité du conducteur.
ERTMS/ATO couvre plusieurs utilisations, allant de la conduite manuelle assistée (GoA1 C-DAS), jusqu’à l’exploitation intégralement automatisée (GoA4). Le degré d’automatisation de l’exploitation étant celui supporté à la fois par le matériel roulant, et l’infrastructure au sol, sur un itinéraire donné.
ERTMS/ATO est compatible avec l’ATP ERTMS/ETCS en niveaux 1 et 2.
La spécification d’ERTMS/ATO, le SUBSET-125, ne couvre pas :
- l’utilisation d’ERTMS/ATO sans ERTMS/ETCS embarqué,
- les niveaux d’automatisation GoA3 et GoA4.
1.3 Décomposition d’ERTMS/ATO
ERTMS/ATO est décomposé en deux deux-systèmes :
- ATO Sol (ATO Trackside) : c’est une passerelle, connectée aux systèmes informatiques existants. L’ATO Sol récupère les données horaires et les plan de voies des TMS, par le biais d’une interface qui ne fait pas l’objet d’une standardisation. En effet : les TMS sont des systèmes qui existent déjà, et qui sont spécifiques.
- ATO Bord (ATO Onboard) : c’est le pilote automatique qui commande le train, et qui reçoit de l’ATO Sol les données horaires et de plan de voies, dans un format standardisé, afin de garantir l’interopérabilité.

Illustration d’ERTMS/ATO, avec les équipements à bord et au sol.
Crédit : SIEMENS
2 Journey Profiles & Segment Profiles
2.1 Généralités
Lorsqu’un conducteur conduit son train, il respecte la mission qui lui a été confiée. Cette mission, c’est la fiche horaire : le conducteur sait avec ce document à quelle heure il est supposé traverser telle gare ou tel point remarquable. C’est avec cette fiche horaire que le conducteur gère la traction et le freinage de son train, afin d’être ni en avance, ni en retard.
L’ATO Bord a le même objectif. Il doit respecter les horaires qui lui ont été confiés. Pour cela, il s’appuie sur une donnée d’entrée qui s’appelle le Journey Profile.
2.2 Journey Profiles (JP)
Le JP définit l’itinéraire d’un train donné dans l’infrastructure, et liste un ensemble de Segment Profiles (SP), caractérisant les voies que le train va parcourir.
Ainsi, le Journey Profile contient un ensemble d’informations permettant à l’ATO Bord de connaître :
- l’itinéraire dans l’infrastructure, en fournissant une liste de segments de voie (les Segment Profiles), que l’ATO Bord doit demander à l’ATO Sol :
- Identifiant des SPs,
- Version des SPs,
- Direction de déplacement des SPs,
- les données opérationnelles (la mission), contenant une liste de :
- Timing Points (TP – points de passage horaires) et leur identifiant,
- L’heure d’arrivée et la tolérance associée,
- L’alignement des TP,
- et d’autre caractéristiques, parcourables dans la clause 6.4.2.1 du SUBSET-125.
- les contraintes éventuelles sur le réseau, comme des zones de restriction de vitesse, d’adhérence dégradée ou d’inhibition de l’autopilotage.
Le Journey Profile est l’élément de départ. Il fait référence à une seconde donnée d’entrée pour l’ATO Bord : les caractéristiques de la voie qui sera empruntée par l’itinéraire dans l’infrastructure. C’est le Segment Profile.
2.3 Segment Profiles (SP)
Le Segment Profile contient des informations caractérisant les voies de l’itinéraire dans l’infrastructure, requis par le Journey Profile. Ainsi, l’ATO Sol doit envoyer à l’ATO Bord, les SPs contenant les données de voies requises pour l’opération de l’ATO Bord.
Le contenu du Segment Profile pourra être consulté dans les clauses 6.4.3.2 et 6.4.3.3 du SUBSET-125.
3 L’interaction entre ATO Sol et ATO Bord
3.1 ATO Sol : la boîte aux lettres
L’ATO Sol est une application, pouvant fonctionner sur un ou plusieurs serveurs. Elle est connectée au TMS, et plus généralement aux systèmes informatiques du gestionnaire d’infrastructure. L’ATO sol récupère à tout instant les données horaires, ainsi que les propriétés du plan de voies, qui lui sont mises à disposition par le TMS et les outils informatiques du gestionnaire d’infrastructure. Il adapte ces informations, dans le format du standard, c’est-à-dire Journey Profiles et Segment Profiles.
A bord du train, nous avons la partie bord de l’ATO. Lorsque l’ATO bord est réveillé, il connait l’adresse IP de son ATO sol de référence. Ainsi, il va ouvrir une liaison, et demander à l’ATO sol s’il a une mission pour lui. Si c’est le cas, l’ATO sol lui envoie un Journey Profile. L’ATO bord pourra demander à l’ATO sol les Segment Profiles associés. S’il n’existe pas de mission pour cet ATO bord, alors celui-ci va continuer à interroger régulièrement l’ATO sol.
Ainsi, l’ATO Sol agit comme une boîte aux lettres, en convertissant les informations spécifiques provenant des TMS et outils informatiques du gestionnaire d’infrastructure, au format standard JP+SP, et en les envoyant à l’ATO Bord concerné.

3.2 ATO bord : l’autopilote aux manettes
L’ATO bord, c’est l’autopilote qui va commander la traction et le freinage du train. Pour cela, l’ATO bord va utiliser les Journey Profile et Segment Profile qui lui ont été envoyés par l’ATO sol, afin de réaliser la mission.
De plus, l’ATO doit conduire le train en respectant les informations de signalisation qui lui sont transmises. S’il ne le fait pas, l’ETCS applique le freinage d’urgence.

Schéma représentant les systèmes standardisés ERTMS/ETCS et ERTMS/ATO. Les interfaces standardisées sont en orange.
4 La fonction de conduite d’ERTMS/ATO
ERTMS/ATO s’appuie sur un ensemble de fonctions, l’une d’entre-elles étant la fonction de conduite, sur laquelle nous allons nous concentrer.
La fonction de conduite (ATO driving function) est décomposée en quatre sous fonctions :
- Time Table Speed Management (TTSM). Avec cette fonction, l’ATO bord calcule un profil de vitesse dont l’objectif est d’arriver à l’heure aux Timing Points définis dans le JP, tout en minimisant le plus possible la consommation d’énergie. Ce profil de vitesse est appelé Optimum Speed Profile.
- Supervised Speed Envelope Management (SSEM). Avec cette fonction, l’ATO bord calcule un profil de vitesse maximum que le train peut suivre, sans être pris en charge par l’ETCS.
- Automatic Train Stopping Management (ATSM). Avec cette fonction, l’ATO bord calcule un profil de vitesse permettant de stopper le train automatiquement aux Stopping Points.
- ATO Traction / Brake Control. Avec cette fonction, l’ATO bord génère les commandes vers le train, afin de suivre le profil de vitesse ATO Operational Speed Profile, qui est la combinaison des profils de vitesse de TTSM, SSEM et ATSM. Le train utilisera ces commandes, afin de tractionner et freiner.

5 L’interaction avec le conducteur
L’ATO est un nouveau système pour le conducteur. L’interaction entre le conducteur et l’autopilote doit être la plus fluide possible, pour ne pas rajouter de la complexité supplémentaire.
La solution ERTMS/ATO utilise l’écran d’interface d’ERTMS/ETCS, le DMI (Driver Machine Interface), afin d’afficher au conducteur les informations sur l’état du système, et les données liées à la mission (heure, prochain arrêt). Le conducteur, par appui sur des boutons, peut engager l’ATO ou le désengager. C’est aussi par le DMI, que le conducteur réalise l’entrée des données train, requises à la fois par ERTMS/ETCS et ERTMS/ATO.
6 Architecture d’ERTMS/ATO
6.1 Construction du système

Architecture stylisée du système ERTMS/ATO (GoA2), et de ses acteurs. Crédit : Antoine BLAS pour Voie Libre.
Le point de départ est le train dont nous souhaitons piloter automatiquement la traction et le freinage, pour opérer la mission. Le système de contrôle-commande du train (TCMS) doit être prévu pour fonctionner avec un autopilote. Si ce n’est pas le cas, par exemple pour un train déjà existant qui fait l’objet d’une modernisation, alors des adaptateurs sont nécessaires. En effet, les trains actuels ont été conçus pour être pilotés uniquement via un pupitre de conduite !
L’ATO à bord (ATO-OB) commande la traction et le freinage au TCMS, en respectant les informations de signalisation qui lui sont fournies par l’ETCS à bord (ETCS-OB). L’ETCS à bord reçoit les informations de signalisation du sol par les systèmes ETCS installés à la voie (ETCS-TS), qui récupèrent l’état de la signalisation à la source : le système d’enclenchement (Interlocking).
L’ATO à bord (ATO-OB) respecte les horaires de la mission, qui a été transmise par l’ATO au sol (ATO-TS), qui a le rôle de boîte aux lettres. La liaison entre ATO bord et sol se fait par radio en utilisant la 2G/3G/4G/5G en fonction du réseau disponible.
L’ATO au sol (ATO-TS) est une application logée dans un serveur. Elle récupère du système de gestion de trafic (Traffic Management System) le schéma opératoire en vigueur à tout instant sur le réseau ferré. Toute mise à jour du schéma opératoire (par exemple modification d’horaires ou de points d’arrêts), est détectée par l’ATO au sol, et transmise à l’ATO bord concerné.
Sur le schéma ci-dessus, on retrouve donc :
- le monde du matériel roulant, en bleu clair,
- le monde de l’exploitation, en bleu foncé,
- le monde de la signalisation, en rouge.
6.2 Architecture détaillée d’ERTMS/ATO

Architecture ERTMS/ATO. Source : SUBSET-125 version 1.0.0.
La figure ci-dessus représente l’architecture du système complet :
- ERTMS/ATO en vert, décrit dans le SUBSET-125
- Signalisation embarquée ETCS-OB en gris clair, décrite dans le SUBSET-026
- Conducteur, train et enregistreur juridique en gris foncé
Sur cette architecture, on peut tout de suite identifier les interfaces internes et externes du système ERTMS/ATO. Les interfaces FFFIS (Form-Fit Function Interface Specification) permettent une interchangeabilité des composants : elles sont plug’n’play. Cela signifie concrètement qu’il est possible d’utiliser un système ETCS d’Alstom, avec un ATO d’Hitachi par exemple.
L’interface interne se résume à celle entre l’ATO sol (ATO/DAS Trackside) et l’ATO bord (ATO/DAS onboard) : c’est le SUBSET-126. C’est cette interface qui permet l’envoi des Journey Profile et Segment Profile. Le SUBSET-148 précise les couches de transport et de sécurité de l’interface.
Passons maintenant aux interfaces externes.
Afin de ne pas provoquer de freinage d’urgence, l’ATO bord respecte les informations de signalisation qui lui sont transmises par l’ETCS bord. Cette interface est le SUBSET-130. La spécification de l’ERTMS/ETCS, le SUBSET-026 en version 4.0.0, spécifie les nouveautés permettant la prise en charge d’ERTMS/ATO. Le SUBSET-143 précise les couches de communication de l’interface.
Lorsque l’ATO commande la traction et le freinage au train, il communique avec le système de contrôle-commande du matériel roulant. Cette communication se fait via l’interface SUBSET-139. Le SUBSET-147 précise les couches de communication de l’interface.
L’ensemble des SUBSETs est disponible dans la bibliothèque.
7 ERTMS/ATO prototypé et testé
En parallèle de la conception du système et de sa documentation, les industriels du groupe de travail ont réalisé des prototypes.
Ces prototypes ont été testés sur des plateformes de simulation, notamment afin de tester l’interopérabilité. Pour chaque test de référence, l’ETCS bord, l’ATO sol et l’ATO bord étaient tous fournis par un industriel différent, afin de vérifier que l’ensemble fonctionne correctement grâce aux interfaces standard.
ERTMS/ATO a également été testé sur un train britannique, dont vous pourrez voir une vidéo ci-dessous.
La solution ERTMS/ATO a également été testée en France, sur la ligne Longwy-Longuyon équipée de l’ERTMS/ETCS Niveau 1. La locomotive BB27000 du projet Train de Fret Autonome, équipée d’un bi-standard ERTMS/KVB d’Alstom, et du système ERTMS/ATO, a circulé en octobre 2020 pour l’expérimentation. [9]
8 Perspectives
8.1 Migration vers ERTMS/ATO
Qui dit ATO over ETCS dit… ETCS. Le système ne fonctionne pas sur une ligne qui n’est pas encore équipée du système de signalisation ERTMS/ETCS. Or le déploiement de ce système demande du temps.
Cette situation pose un sérieux problème aux entreprises ferroviaires souhaitant lancer sans attendre le pilotage automatique, afin de bénéficier de la réduction de consommation d’énergie. Elle retarde donc l’adoption de la solution ERTMS/ATO.
Afin de pallier cette difficulté, des expérimentations de la solution ERTMS/ATO basée sur la perception visuelle de la signalisation latérale sont menées par des opérateurs.
En janvier 2022, les équipes du projet Train de Fret Autonome démontrent la faisabilité du pilotage automatique, en utilisant la solution standard ERTMS/ATO (GoA2), alimentée par des systèmes de perception visuelle et de conversion de la signalisation latérale. La vidéo ci-dessous présente les essais conduits du 24 au 28 janvier 2022 sur la ligne Longwy-Longuyon. [10]
8.2 Augmentation de capacité avec ERTMS/ETCS niveau 2
Nous avons vu que le système ERTMS/ATO utilise ERTMS/ETCS comme ATP, et qu’il est possible d’utiliser ERTMS/ATO à la fois en niveaux 1 et 2 de l’ETCS.
Le niveau 1 étant semi-ponctuel en terme de transmissions de données de signalisation entre le bord et le sol, il ne permet pas de porter une ligne à son potentiel maximal de capacité.
Le niveau 2, en revanche, est basé sur la transmission continue via la radio. Par conséquent, porter une ligne à son potentiel maximal de capacité, d’un point de vue ERTMS/ETCS, passe par l’installation du niveau 2. Une augmentation supplémentaire de capacité peut-être obtenue, par l’utilisation du canton mobile, soit en pur canton mobile virtuel, ou bien en niveau 3 hybride. C’est la raison pour laquelle le niveau 2 est la solution de référence du système cible vers lequel l’espace ferroviaire unique européen doit tendre. [11]
8.3 Augmentation de capacité avec des TMS modernes
Nous avons vu que le système ERTMS/ATO utilise une passerelle au sol (ATO sol), afin de se connecter aux systèmes informatiques de gestion de trafic du gestionnaire d’infrastructure. Evidemment, la performance et la réactivité de l’exploitation est conditionnée par la performance de cet outil informatique de gestion du trafic.
Tendre vers du transport de masse, avec des intervalles réduits entre les trains, et du pilotage automatique, nécessite l’utilisation de systèmes informatiques de gestion du trafic performants et hautement automatisés. Cette automatisation permet au TMS de traiter un grand nombre de trains pilotés automatiquement sur une même ligne, et d’anticiper les potentiels ralentissements à venir sur la ligne, grâce aux statuts envoyés par les ATO vers le sol.
Note : dans cet article, j’ai systématiquement utilisé le terme TMS (Traffic Management System) pour désigner les systèmes informatiques de gestion du trafic. Ce terme est employé dans le contexte Grandes Lignes (Mainline). Dans le context urbain, on parlera d’ATS (Automatic Train Supervision).
La vidéo ci-dessous montre comment la mise en oeuvre d’un ATS performant sur le RER E, est une condition initiale pour permettre le transport de masse.
8.4 ERTMS/ATO GoA4
La prochaine étape pour le système ERTMS/ATO est d’aller du niveau d’autonomie GoA2 vers les niveaux GoA3 et GoA4. Les travaux de spécification ont commencé en 2019, au sein du projet Shift2Rail X2RAIL-4, et se sont terminés en décembre 2023, avec la publication d’un premier document. Les travaux de spécification, prototypage et démonstration se poursuivent dorénavant au sein du projet R2DATO. Ces résultats alimenteront l’activité de standardisation du Pilier Système, afin de mettre à jour les Spécifications Technique d’Interopérabilité en conséquence.
Le passage de GoA2 vers GoA3/4 ouvre des problématiques complexes : perception de l’environnement, détection des aléas, prises de décisions en fonction des aléas. De nouvelles technologies sont requises :
- Vision par ordinateur (computer vision),
- Localisation absolue aidée par satellites et centrales inertielles,
- Prise de décision automatisée.

Synthèse
En niveau d’automatisation GoA1, des aides à la conduite existent permettant la régulation de vitesse, ou encore l’affichage de recommandations de conduite, afin de pratiquer l’éco-conduite. Le tout en étant constamment supervisé par le système de protection du train, l’ATP.
C’est en GoA2, qu’un dispositif permet de piloter automatiquement le train, en prenant en compte un ensemble d’informations en entrée, entre autres les horaires de la mission, ainsi que la signalisation à respecter.
Le pilotage automatique offre des bénéfices clairs. Il permet de réduire la consommation d’énergie par une conduite optimisée et durable. De plus, il permet d’uniformiser la conduite d’une flotte de trains, ce qui réduit la dispersion horaire dans le schéma d’exécution. Cela dégage des capacités supplémentaires, qui peuvent être utilisées pour injecter plus de trains.
Ces bénéfices ont motivé l’introduction du pilotage automatique dans les milieux assez homogènes et fermés : les métros. Des systèmes intégrés et propriétaires nommés CBTC y sont massivement utilisés. Pour autant, le CBTC n’est pas utilisable sur le réseau ferré national, car l’interopérabilité est obligatoire.
C’est ainsi que le pilotage automatique interopérable a été mis au point : c’est ERTMS/ATO. Cet autopilote fonctionne en tandem avec l’ATP ERTMS/ETCS, et fait pleinement partie du système ERTMS. Il est désormais intégré à la Spécification Technique d’Interopérabilité – Contrôle Commande et Signalisation.
Pour tirer le plein potentiel d’ERTMS/ATO, et porter une ligne à son potentiel maximal de capacité, deux éléments fondamentaux du système ferroviaire sont à moderniser. L’ATP d’une part, en passant à un niveau radio d’ERTMS/ETCS. Le TMS d’autre part, en utilisant des systèmes de gestion du trafic hautement automatisés. Ce triptyque ERTMS/ETCS niveau 2, TMS automatisé et ERTMS/ATO, deviendra incontournable ces prochaines années, pour faire du transport de masse sur le réseau ferré national, et ainsi contribuer au report modal vers le train.
Documentation ERTMS/ATO
Documentation relative à la Spécification Technique d’Interopérabilité Controle-Commande et Signalisation (2023)
- SUBSET-125 : ERTMS/ATO System Requirements Specification version 1.0.0
- SUBSET-126 : ATO-OB / ATO-TS FFFIS Application Layer version 1.0.0
- SUBSET-148 : ATO-OB / ATO-TS FFFIS Transport & Security Layers version 1.0.0
- SUBSET-130 : ATO-OB / ETCS-OB FFFIS Application Layer version 1.0.0
- SUBSET-139 : ATO-OB / Rolling Stock FFFIS Application Layer version 1.0.0
- SUBSET-143 : Interface Specification Communication Layers for on-board communication version 1.0.0
- SUBSET-147 : CCS Consist Network Communication Layers FFFIS version 1.0.0
- 13E154 : ERTMS/ATO Glossary version 2-
Documentation issue des programmes européens de R&D collaborative
Programme Europe’s Rail Joint Undertaking (2021+)
- R2DATO project : Documentation of use cases for Perception system
- R2DATO project : Documentation of use cases for automating functions
- R2DATO project : Documentation of freight specific user requirements for automation process
- R2DATO project : Documentation of urban use cases and operational rules for automation process
- R2DATO project : ATO up to GoA4 specifications review documentation
Programme Shift2Rail (2014-2021)
- X2RAIL-4 project : ATO up to GoA4 Specification
- X2RAIL-4 project : ATO up to GoA4 Tests Report
- TAURO project : Technologies supporting the migration to ERTMS/ATO
- TAURO project : ATO automatic functional test Report
- TAURO project : ATO running capability Report
Crédit photo de couverture : Alstom
Références :
[1] https://securite-ferroviaire.fr/la-securite-ferroviaire/comprendre-la-securite-ferroviaire
[2] https://www.ertms.net/wp-content/uploads/2021/07/ERTMS_Factsheet_8_UNISIG.pdf
[3] https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/PDF/?uri=CELEX:32016R0919
[4] https://voie-libre.com/wp-content/uploads/2024/02/DP-le-groupe-RATP-leader-mondial-du-metro-automatique.pdf
[5] https://www.ratp.fr/travaux-ete-rer/les-chiffres-cles-du-rer
[6] https://www.alstom.com/fr/press-releases-news/2017/5/alstom-a-debute-avec-succes-la-mise-en-service-du-pilotage-automatique-sur-le-rer-a
[7] https://voie-libre.com/wp-content/uploads/2022/12/List-of-CCS-Class-B-systems.pdf
[8] https://www.alstom.com/fr/press-releases-news/2023/11/alstom-remporte-un-contrat-de-300-millions-deuros-pour-equiper-2-lignes-rer-en-ile-de-france-avec-la-derniere-technologie-de-signalisation-nexteo
[9] https://www.alstom.com/fr/press-releases-news/2020/12/sncf-et-ses-partenaires-font-circuler-le-premier-train-semi-autonome
[10] https://railenium.eu/de-nouveaux-essais-reussis-pour-le-train-autonome/
[11] https://rail-research.europa.eu/system_pillar/why-a-ccs-focus/