Le train autonome, est un train dont la traction et le freinage sont gérés par un autopilote, qui respecte les ordres de la signalisation et les horaires du déplacement, tout en optimisant la consommation d’énergie. Le pilotage automatique peut se faire en présence d’un conducteur, ou non.
Les projets visant à introduire le pilotage automatique sur les trains sont nombreux. Certains visent à tester la conduite en présence d’un conducteur ou de personnel à bord, et d’autres à faire circuler des trains sans personnel à bord. Faisons le tour de quelques projets dans cet article !
Si vous ne l’avez pas déjà fait, je vous recommande de lire en premier lieu l’article Qu’est-ce que le train autonome ?
Qu'est-ce que le train autonome ?
Dernière mise à jour : 05/03/2023.
Les projets de train autonome by Bastian Simoni is licensed under CC BY-NC-SA 4.0
Introduction
Vous avez-dit ATO ?
ATO est le terme de la filière ferroviaire pour designer les systèmes de conduite automatique des trains, aussi bien dans le monde du métro que des grandes lignes. L’acronyme signifie Automatic Train Operation, soit Operation Automatique du Train. Derrière tout train autonome, se cache donc un système ATO !
Le système ATO fonctionne en lien avec autre système, appelé ATP (Automatic Train Protection). L’ATP est le système de protection du train : il surveille à tout instant le bon respect des limitations de vitesse, et le non-franchissement des signaux fermés. Que ce soit un conducteur ou bien un pilotage automatique, si le train roule trop vite, ou bien qu’il franchit un signal fermé, alors l’ATP applique immédiatement le freinage d’urgence.
Plusieurs degrés d’automatisation sont possibles dans le ferroviaire. Une définition proposée est le Grade of Automation (GoA) : allant de GoA0 (conduite à vue) à GoA4 (aucun personnel à bord).
Le degré d’automatisation des trains
Les technologies de signalisation et automatismes ferroviaires offrent différents degrés d’automatisation de l’exploitation des trains. Une définition proposée par l’UITP (Union Internationale des Transports Publics) est le Grade of Automation (GoA), de 0 à 4.
- GoA0 : conduite à vue,
- En conduite à vue, le conducteur tractionne et freine le train selon ce qu’il voit dans l’environnement (signaux, obstacles, dangers). Aucun dispositif n’est là pour superviser sa conduite. La marche à vue est couramment utilisée pour le tramway, où les vitesses restent faibles.
- GoA1 : conduite supervisée par un ATP,
- Le GoA1 apporte un premier niveau d’automatismes, car la conduite est supervisée par un système de protection (ATP – Automatic Train Protection).
- Un ATP peut protéger le train contre le franchissement de signaux fermés, ou le dépassement d’une vitesse limite, en appliquant automatiquement le freinage d’urgence.
- GoA2 : traction et le freinage automatisés,
- Dans ce niveau, un ATO génère les consignes de traction et de freinage et les envoie vers le train, à la place du conducteur.
- L’ATO génère ces consignes selon les limites de signalisation fournies par l’ATP, tout en respectant les horaires de la mission à réaliser. L’ATP continue sa supervision, et applique automatiquement le freinage d’urgence si l’automatisme ne respecte pas la signalisation.
- Le conducteur reste en cabine et continue d’observer l’environnement, afin de reprendre la main en cas de situation dégradée.
- GoA3 : train autonome, avec du personnel à bord,
- En GoA3, il n’y a plus de conducteur en cabine. Les aléas de l’environnement (obstacles, dangers) doivent être adressés par d’autres moyens.
- Du personnel reste à bord pour conseiller les passagers, et intervenir en cas d’aléas.
- GoA4 : train autonome, sans personnel à bord,
- Il s’agit du niveau d’automatisation le plus avancé, dans lequel il n’y a pas de personnel à bord du train.
- C’est le degré d’automatisation du métro de la ligne 14 à Paris par exemple.
Illustration des rôles et responsabilités selon le GoA. Crédit : ALSTOM.
Les projets GoA2
Digitale S-Bahn Hamburg (Allemagne)
Ce projet consiste à apporter le GoA2 sur le réseau de RER de la ville de Hambourg. La technologie utilisée est ATO over ETCS. [1]
Le système ATO over ETCS
Le projet est mené par la Deutsche Bahn avec l’industriel SIEMENS. L’automatisme a été déployé sur 23 km de la ligne S21 entre Berliner Tor et Auhmüle, et une rame a circulé en conduite automatique lors de l’évènement ITS Hamburg en octobre 2021. L’automatisme sera déployé sur quatre rames supplémentaires en 2022, et les 64 trains restants seront équipés dans un futur proche. [2]
Selon les promoteurs du projet, les avantages sont :
- Davantage de capacité sans construction de nouvelles voies
- Une exploitation plus robuste pour davantage de ponctualité
- Une meilleure efficacité énergétique, en optimisant la conduite des trains
Crédit : Siemens Mobility.
Les projets GoA3
ENNO/ARTE (Allemagne)
Ce projet lancé en 2020 regroupe l’opérateur allemand ENNO et l’industriel ALSTOM. L’objectif est d’aboutir en 2023 à une démonstration de circulation commerciale en GoA3, et des manoeuvres de train en dépôt en GoA4.
Deux trains régionaux de type Coradia Continental d’ALSTOM seront équipés de la technologie ATO over ETCS.
Le projet associe l’université de Berlin, ainsi que le centre aérospatial allemand (DLR), qui exploreront l’utilisation de l’intelligence artificielle. [3]
Alstom Coradia Continental. Crédit : Alstom.
Les projets GoA4
Train de Fret Autonome (France)
Introduction
Lancé en 2018, Train de Fret Autonome est un projet de R&D collaboratif. Ce projet a plusieurs objectifs :
- Démontrer la faisabilité avec un prototype sur plusieurs jalons :
- conduite semi-autonome sous signalisation européenne ERTMS/ETCS,
- conduite semi-autonome par la perception visuelle de la signalisation latérale,
- conduite GoA4 avec gestion des aléas,
- Mener les études système, afin d’aboutir à un cahier des charges en fin de projet.
Le projet est organisé en consortium, composé d’ALSTOM, Apsys, Capgemini, Hitachi, Railenium et SNCF. [4]
Le prototype se base sur une locomotive BB427000, modifiée de manière progressive, afin de servir l’expérimentation. La première modification de la locomotive a eu lieu en septembre 2019 sur le site ALSTOM de Belfort, avec la mise en place des armoires pour héberger les équipements informatiques permettant la conduite autonome. Cette modification visait notamment à mettre en place les 600 connexions nécessaires, pour digitaliser la locomotive, c’est à dire pouvoir la piloter informatiquement en lieu et place du pupitre conducteur. [5]
Jalon ATO over ETCS
En octobre 2020, le projet a validé avec succès la traction et le freinage automatique, en présence d’un conducteur (GoA2).
Cette démonstration s’est faite avec le système ATO over ETCS, sur la ligne Longwy-Longuyon, équipée du système de signalisation européen ERTMS/ETCS Niveau 1. [6]
Jalon ATO sous signalisation latérale
En janvier 2022, les équipes du projet Train de Fret Autonome démontrent la faisabilité de la conduite automatique avec la solution ATO over ETCS, adaptée pour fonctionner via la perception visuelle de la signalisation latérale, sur la ligne Longwy-Longuyon. [9]
ATO sous signalisation latérale
Jalon détection des obstacles
En juin 2022, le projet démontre la faisabilité de la perception visuelle des obstacles, de la transmission de l’information au système, et l’application du frein, le tout en moins de 2 secondes. [10]
La perception visuelle de l’environnement extérieur, ainsi que la prise de décisions, sont des éléments fondamentaux permettant d’aller vers l’autonomie complète GoA4.
Train autonome : du GoA2 au GoA4
Train Autonome Service Voyageurs (France)
Projet parallèle à Train de Fret Autonome, Service Voyageurs associe ALSTOM, Bosch, Railenium, SNCF, Spirops et Thales.
L’objectif est de modifier progressivement une rame TER de type Regio2N, afin d’aboutir à une circulation autonome en 2023. [7]
Rame Regio2N du projet Service Voyageurs. Crédit : Laurent Mayeux.
AutoHaul pour Rio Tinto (Australie)
Introduction
Le premier train de fret autonome a démarré son service commercial en 2018 : c’est AutoHaul. Développé par Hitachi Rail STS, ce train appartenant à l’entreprise Rio Tinto, achemine le minerai de fer des mines australiennes jusqu’aux ports, sans personne à bord.
Un train classique est long de 2,5 km, et est composé de deux locomotives diesel tirant 240 wagons de minerais pour environ 28 000 tonnes.
Le train de fret autonome AutoHaul dans le désert australien. Crédit : Hitachi Rail STS.
Le système AutoHaul
Le système AutoHaul est basé sur la solution européenne de conduite automatique ATO over ETCS, et le système de signalisation européen ERTMS/ETCS Niveau 2. Il est complété d’un système de détection de collision et de caméras vidéo.
42 passages à niveaux du réseau de voies ferrées Rio Tinto ont été équipés d’un système de supervision composé de :
- Barrières optiques permettant la détection d’objets sur le passage à niveau
- Caméras de surveillance
- Dispositifs d’éclairage
L’état de santé de la locomotive ainsi que du système autonome à bord est surveillé à tout instant par une équipe au centre de supervision situé à Perth [8].
Qu'est-ce que le train autonome ?
Crédit photo de couverture : Bastian Simoni
Références
[1] https://s-bahn.hamburg/magazin/digitale-s-bahn-hamburg
[2] https://digitale-schiene-deutschland.de/en/digital-S-Bahn-Hamburg
[3] https://www.alstom.com/fr/press-releases-news/2020/5/premiere-mondiale-le-systeme-de-conduite-automatique-des-trains-ato-sera
[4] https://www.sncf.com/fr/innovation-developpement/innovation-recherche/trains-autonomes-circuleront-en-2023
[5] https://www.sncf.com/fr/groupe/newsroom/essais-prototype-train-fret-autonome
[6] https://www.alstom.com/fr/press-releases-news/2020/12/sncf-et-ses-partenaires-font-circuler-le-premier-train-semi-autonome
[7] https://www.alstom.com/fr/press-releases-news/2021/5/une-nouvelle-etape-franchie-pour-le-train-autonome
[8] https://www.hitachi.com/rev/archive/2020/r2020_06/06a05/index.html
[9] https://www.sncf.com/fr/groupe/newsroom/train-fret-autonome-230222
[10] https://www.sncf.com/fr/groupe/newsroom/train-autonome280622